Hypnose: une vraie alternative thérapeutique Par Guillaume Varinot, Clément Befve, et Dr François-André Allaert. Dijon-sante.fr
Nous nous mettons tous en état d’hypnose chaque jour sans s’en rendre compte que ce soit lorsque nous sommes absorbés par un livre ou un peu dans la lune. Aujourd’hui et comme depuis des siècles, l’hypnose est utilisée à visée thérapeutique. Une alternative applicable à beaucoup de domaines et dont l’efficacité n’est plus à prouver …
L'hypnose comme anesthésie. Pascale Santi et Dr Jean Becchio. Journal Le Monde
En chirurgie, l'hypnose est de plus en plus utilisée par le corps médical et choisie par les patients. Moins de douleurs, de médicaments, d'hospitalisation... les avantages de cette technique sont nombreux. A l'occasion du 5e congrès international Hypnose et Douleur (du 1er au 3 mai 2014 à La Rochelle), décryptage de cette technique avec la journaliste Pascale Santi et le médecin Jean Becchio.
« Pensez à quelque chose qui vous plaît, une odeur, respirez calmement. » Dans un des blocs opératoires de l’hôpital Saint-Joseph, à Paris, ce mardi 14 janvier au matin, le docteur Marc Galy, anesthésiste, parle doucement à Hocine Ayyati, âgé de 78 ans, qui doit subir l’opération d’une artère carotide. De façon répétitive, il lui suggère de respirer, de ne rien faire, d’être là. « On peut s’imaginer quelque part, à une terrasse de café, ou ailleurs, dans un aéroport, tout est possible, on va regarder les gens passer », suggère le médecin, qui commence l’anesthésie locale et continue de parler au patient.
Pendant ce temps, l’équipe médicale se prépare. Le docteur Galy répète plusieurs fois la même chose, c’est l’hypnose par confusion. M. Ayyati semble détendu. « Le patient est totalement conscient. Il est entré en hypnose, dans un état de conscience modifié », nous explique le docteur Galy. Trente minutes plus tard, le chirurgien Samy Anidjar arrive. Tout au long de l’intervention, le docteur Galy surveille les constantes, ne quitte pas son patient. « Ça tire un peu… », dit celui-ci au milieu de l’opération. De l’autre côté du drap bleu, le cou est incisé sur une dizaine de centimètres, l’équipe enlève les plaques d’athérome obstruant l’artère. Opération délicate. Front contre front, l’anesthésiste susurre doucement à l’oreille de M. Ayyati lorsque celui-ci pose une question, et le patient répond lorsqu’il est sollicité.
PLUSIEURS MOIS D’ATTENTE DANS LES CONSULTATIONS À L’HÔPITAL...
« Pensez à quelque chose qui vous plaît, une odeur, respirez calmement. » Dans un des blocs opératoires de l’hôpital Saint-Joseph, à Paris, ce mardi 14 janvier au matin, le docteur Marc Galy, anesthésiste, parle doucement à Hocine Ayyati, âgé de 78 ans, qui doit subir l’opération d’une artère carotide. De façon répétitive, il lui suggère de respirer, de ne rien faire, d’être là. « On peut s’imaginer quelque part, à une terrasse de café, ou ailleurs, dans un aéroport, tout est possible, on va regarder les gens passer », suggère le médecin, qui commence l’anesthésie locale et continue de parler au patient.
Pendant ce temps, l’équipe médicale se prépare. Le docteur Galy répète plusieurs fois la même chose, c’est l’hypnose par confusion. M. Ayyati semble détendu. « Le patient est totalement conscient. Il est entré en hypnose, dans un état de conscience modifié », nous explique le docteur Galy. Trente minutes plus tard, le chirurgien Samy Anidjar arrive. Tout au long de l’intervention, le docteur Galy surveille les constantes, ne quitte pas son patient. « Ça tire un peu… », dit celui-ci au milieu de l’opération. De l’autre côté du drap bleu, le cou est incisé sur une dizaine de centimètres, l’équipe enlève les plaques d’athérome obstruant l’artère. Opération délicate. Front contre front, l’anesthésiste susurre doucement à l’oreille de M. Ayyati lorsque celui-ci pose une question, et le patient répond lorsqu’il est sollicité.
PLUSIEURS MOIS D’ATTENTE DANS LES CONSULTATIONS À L’HÔPITAL...
Les urgentistes recourent à l'hypnose médicale Séverine GUÉGUEN.Ouest-France
Bien loin d'un numéro de foire, l'hypnose est de plus en plus utilisée dans la prise en charge de la douleur des patients. Aux urgences de Fougères, les médecins sont tous formés à cette technique.
Qui n'a pas en tête des spectacles hauts en couleurs où, par un claquement de doigts de l'hypnotiseur, le public se trouve envoûté par sa voix et perd tout contrôle de la situation ? L'hypnose médicale n'a rien de semblable. « Il s'agit d'une technique d'aide utilisée dans les situations de douleur, de stress ou d'angoisse », définit Didier Marchand, chef de service des urgences du centre hospitalier de Fougères.
L'état hypnotique se définit comme un état modifié de nos perceptions. Le médecin précise : « Il s'agit bien d'un état de veille et non de sommeil : la conscience du patient est guidée par le médecin, pour se concentrer et se rendre extrêmement attentive sur une conversation. »
Formés à l'Institut de formation et de recherche en hypnose et communication thérapeutique Émergences à Rennes, les sept médecins urgentistes de l'hôpital fougerais se sont spécialisés à des techniques permettant la prise en charge de la douleur aiguë. « Nous pratiquons l'hypnose depuis plus de trois ans. Parfois même dans les ambulances », précise-t-il.
Mieux accompagner les patients...
À Fougères, l'hypnose médicale débute dès les premiers échanges entre médecins et patients. « Lors d'un soin et, a fortiori au service des urgences, le patient peut se retrouver dans un contexte anxiogène, décrit Didier Marchand. Il est alors primordial de se mettre à la place du patient, afin de mieux comprendre ce qu'il peut recevoir de la part des soignants ». Les bons mots pour soulager les maux...
Entendre « N'ayez pas peur », « ça va être long », « ça ne fera pas mal » peuvent aggraver les choses... Le médecin ajoute : « Ces phrases sont à éviter car elles focalisent l'attention du patient sur ce qui est redouté : la peur, l'inquiétude, le mal... » Leur volonté ? Instaurer un climat sain et bienveillant, pour le bien-être du patient.
...et capter leur attention
« Lorsque la situation s'y prête, nous pratiquons l'hypnose conversationnelle », indique l'urgentiste. C'est-à-dire amener le malade à focaliser son esprit sur un autre sujet, et ce, en toute conscience. Et d'illustrer : « Par exemple, pour poser un plâtre sur le bras fracturé d'un enfant, je lui demande d'imaginer un gobelet dans la main, et de prêter toute sa concentration à ce que le contenu ne se renverse pas ».
Le temps de la conversation, le soin se passe alors dans le calme, sans mouvement brusque, ni angoisse du patient. « Les enfants sont généralement plus réceptifs à l'hypnose que les adultes, en raison de leur imaginaire. Les personnes âgées aussi. »
À l'hôpital de Fougères, l'hypnose n'est pas réservée aux urgentistes. Elle se développe aussi dans les autres services. Pour la péridurale lors d'un accouchement, par exemple. Ou même pour éviter l'anesthésie générale, lors d'une opération chirurgicale. Dès lors, les thérapeutes procèdent à l'hypnose dite formelle : « Le médecin et le patient s'accordent sur un souvenir heureux vers lequel le soigné va se laisser entraîner par hypnose, mais toujours en pleine conscience. »
Qui n'a pas en tête des spectacles hauts en couleurs où, par un claquement de doigts de l'hypnotiseur, le public se trouve envoûté par sa voix et perd tout contrôle de la situation ? L'hypnose médicale n'a rien de semblable. « Il s'agit d'une technique d'aide utilisée dans les situations de douleur, de stress ou d'angoisse », définit Didier Marchand, chef de service des urgences du centre hospitalier de Fougères.
L'état hypnotique se définit comme un état modifié de nos perceptions. Le médecin précise : « Il s'agit bien d'un état de veille et non de sommeil : la conscience du patient est guidée par le médecin, pour se concentrer et se rendre extrêmement attentive sur une conversation. »
Formés à l'Institut de formation et de recherche en hypnose et communication thérapeutique Émergences à Rennes, les sept médecins urgentistes de l'hôpital fougerais se sont spécialisés à des techniques permettant la prise en charge de la douleur aiguë. « Nous pratiquons l'hypnose depuis plus de trois ans. Parfois même dans les ambulances », précise-t-il.
Mieux accompagner les patients...
À Fougères, l'hypnose médicale débute dès les premiers échanges entre médecins et patients. « Lors d'un soin et, a fortiori au service des urgences, le patient peut se retrouver dans un contexte anxiogène, décrit Didier Marchand. Il est alors primordial de se mettre à la place du patient, afin de mieux comprendre ce qu'il peut recevoir de la part des soignants ». Les bons mots pour soulager les maux...
Entendre « N'ayez pas peur », « ça va être long », « ça ne fera pas mal » peuvent aggraver les choses... Le médecin ajoute : « Ces phrases sont à éviter car elles focalisent l'attention du patient sur ce qui est redouté : la peur, l'inquiétude, le mal... » Leur volonté ? Instaurer un climat sain et bienveillant, pour le bien-être du patient.
...et capter leur attention
« Lorsque la situation s'y prête, nous pratiquons l'hypnose conversationnelle », indique l'urgentiste. C'est-à-dire amener le malade à focaliser son esprit sur un autre sujet, et ce, en toute conscience. Et d'illustrer : « Par exemple, pour poser un plâtre sur le bras fracturé d'un enfant, je lui demande d'imaginer un gobelet dans la main, et de prêter toute sa concentration à ce que le contenu ne se renverse pas ».
Le temps de la conversation, le soin se passe alors dans le calme, sans mouvement brusque, ni angoisse du patient. « Les enfants sont généralement plus réceptifs à l'hypnose que les adultes, en raison de leur imaginaire. Les personnes âgées aussi. »
À l'hôpital de Fougères, l'hypnose n'est pas réservée aux urgentistes. Elle se développe aussi dans les autres services. Pour la péridurale lors d'un accouchement, par exemple. Ou même pour éviter l'anesthésie générale, lors d'une opération chirurgicale. Dès lors, les thérapeutes procèdent à l'hypnose dite formelle : « Le médecin et le patient s'accordent sur un souvenir heureux vers lequel le soigné va se laisser entraîner par hypnose, mais toujours en pleine conscience. »
La place de l'Hypnose au CHU de Poitiers
Soulager les patientes opérées de scoliose
Le service d'orthopédie-traumatologie a intégré l'hypnoanalgésie dans la prise en charge de la douleur depuis 2008 et expérimente depuis un an un projet médico-soignant dédié aux patientes opérées de scoliose. Une idée amenée par le Pr Pierre Pries, chirurgien orthopédiste responsable de l'unité rachis, avec l'aide de Marie-Pierre Delaunay, infirmière hypnopraticienne dans le même pôle. Tous deux ont décidé de mutualiser leurs compétences pour tenter de soulager les patientes opérées pour une correction de scoliose ou autre déformation de la colonne : une intervention très douloureuse, pratiquée dans la plupart des cas sur des jeunes filles en fin de croissance particulièrement sujettes au stress. Avec l'accord de la patiente et de sa famille lorsqu'elle est mineure, l'infirmière hypnopraticienne procède à une première séance d'hypnose conversationnelle la veille de l'intervention pour une prise de contact et des explications. Elle revient avec le kinésithérapeute au lendemain de l'intervention et accompagne le premier passage assis au bord du lit d'une séance d'hypnose formelle. Elle intervient de nouveau le surlendemain pour le premier lever. Les jours suivants et jusqu'à la sortie, en moyenne huit jours après l'intervention, la patiente apprend enfin des techniques d'autohypnose qui doivent la rendre plus autonome dans le processus de guérison.
Des résultats positifs
« La correction des scolioses est une chirurgie douloureuse, notre rôle est d'apporter confort et mieux-être aux patientes. Une douzaine d'entre elles ont bénéficié d'une prise en charge par l'hypnoanalgésie. Les résultats sont spectaculaires' et positifs, pour elles et pour leurs familles », témoigne le Pr Pries. « Une évaluation médicale est actuellement réalisée sur les apports de cette pratique en fonction de différents critères : l'échelle de la douleur, l'anxiété, la consommation de médicaments comme les antalgiques morphiniques lourds en effets secondaires, ainsi que la durée d'hospitalisation, déjà réduite à six jours et qui pourrait être abaissée à cinq », poursuit-il. Ce projet innovant a été très bien accueilli par le service et par la direction, qui encourage le développement de cette pratique par la mise en place d'une formation certifiée mais non diplômante de sept jours ouverte principalement aux infirmiers. Une soixantaine de personnes ont ainsi été formées depuis deux ans. Une formation à l'hypnose conversationnelle a par ailleurs débuté depuis quelques mois dans le pôle neurosciences-locomoteur auprès des aide-soignants, infirmiers, kinésithérapeutes et manipulateurs radio demandeurs. L'équipe médicale se montre elle aussi convaincue : chirurgiens et anesthésistes sollicitant ponctuellement les services de l'hypnopraticienne, par exemple pour des pansements douloureux.
Etendre la pratique et développer la formation
L'encadrement du pôle neurosciences-locomoteur a initié et encouragé le développement de ce projet. « L'hypnose induit des valeurs de bienveillance et de bientraitance, elle implique une relation plus forte avec le patient et redonne tout son sens à la notion de prendre soin'. A ce titre, ce projet est un axe prioritaire du projet soignant du pôle », explique Marie-France Joyeux- Soyer, cadre supérieur de santé. « Nous souhaitons donc poursuivre la prise en charge en traumatologie et l'étendre à d'autres services en développant la formation institutionnelle des soignants et la formation du pôle. Cela permettra par ailleurs d'éviter l'écueil de la dépendance des soins à une seule personne », ajoute-t-elle.
Une consultation d'hypnose infirmière sera par ailleurs ouverte au public au sein de l'unité de médecines alternatives du centre régional d'étude et de traitement de la douleur à l'automne prochain.
Les différents types d'hypnose
Les trois types d'hypnose pratiqués lors de la prise en charge des patientes opérées de scoliose :
" L'hypnose conversationnelle:
Tout en conversant tranquillement avec le patient, l'hypnopraticien mène un travail complexe favorisant un climat dissociatif et apaisant, grâce à une trame de communication paraverbale hypnotique. La spontanéité et l'improvisation caractérisent cette forme d'hypnose.
" L'hypnose formelle :
L'hypnopraticien amène par sa simple voix à détacher le patient de son symptôme, douleur ou stress, pour modifier sa perception selon des phases bien définies : focalisation, induction, dissociation, transe, retour. "
L'autohypnose :
Le patient apprend à induire une transe personnelle suivant le même schéma qu'une séance d'hypnose formelle. Il peut modifier sa perception douloureuse ou émotionnelle à tout moment lorsqu'il en sent le besoin, par la mobilisation de ses ressources personnelles mises en lumière auprès de l'hypnopraticien.
Questions à... Marie-Pierre Delaunay, Infirmière hypnopraticienne
Comment en êtes-vous arrivée à pratiquer l'hypnose ?
Je suis infirmière en traumatologie au CHU depuis dix ans, et j'ai découvert le soin par l'hypnose au cours de la préparation de mon diplôme universitaire « douleur » en 2003. De 2008 à 2010, j'ai suivi une formation d'hypnose à l'Institut français d'hypnose à Paris, qui m'a délivré un diplôme d'hypnopraticienne en hypnoanalgésie et hypnosomatique. J'ai rapidement appliqué ces compétences au service des patients de traumatologie, par exemple au moment des pansements dans le cas de plaies douloureuses et complexes.
Comment cette pratique est-elle perçue autour de vous ?
Il est vrai que notre demande de formation à l'hypnose a tout d'abord étonné, mais l'institution nous a offert cette opportunité et nous sommes aujourd'hui deux hypnopraticiennes diplômées avec Béatrice Geaugeais, infirmière puéricultrice aux urgences pédiatriques. Depuis les débuts, je dirais que cette autre manière de soigner est perçue de façon simple. Les patients sont curieux au départ, et il faut parfois mener un travail de démystification, mais ils adhèrent vite et le discours devient inutile devant l'efficacité des résultats. De même pour les soignants et les médecins.
Qu'est-ce que l'hypnose apporte de plus que des soins « classiques » ?
La chimie est importante, mais parfois elle ne suffit pas et l'hypnose intervient comme une technique de soin complémentaire pour soulager la douleur. Et puis il s'agit d'établir une relation de confiance mutuelle avec le patient qui, guidé par l'hypnopraticien, va puiser dans ses ressources personnelles pour participer à son soulagement, voire à sa guérison. On dit que l'hypnose permet au soignant de « soulager les maux avec les mots », de modifier le soin et de « faire du bien sans faire du mal ». Je trouve que c'est une belle représentation de cette médecine alternative.
Le service d'orthopédie-traumatologie a intégré l'hypnoanalgésie dans la prise en charge de la douleur depuis 2008 et expérimente depuis un an un projet médico-soignant dédié aux patientes opérées de scoliose. Une idée amenée par le Pr Pierre Pries, chirurgien orthopédiste responsable de l'unité rachis, avec l'aide de Marie-Pierre Delaunay, infirmière hypnopraticienne dans le même pôle. Tous deux ont décidé de mutualiser leurs compétences pour tenter de soulager les patientes opérées pour une correction de scoliose ou autre déformation de la colonne : une intervention très douloureuse, pratiquée dans la plupart des cas sur des jeunes filles en fin de croissance particulièrement sujettes au stress. Avec l'accord de la patiente et de sa famille lorsqu'elle est mineure, l'infirmière hypnopraticienne procède à une première séance d'hypnose conversationnelle la veille de l'intervention pour une prise de contact et des explications. Elle revient avec le kinésithérapeute au lendemain de l'intervention et accompagne le premier passage assis au bord du lit d'une séance d'hypnose formelle. Elle intervient de nouveau le surlendemain pour le premier lever. Les jours suivants et jusqu'à la sortie, en moyenne huit jours après l'intervention, la patiente apprend enfin des techniques d'autohypnose qui doivent la rendre plus autonome dans le processus de guérison.
Des résultats positifs
« La correction des scolioses est une chirurgie douloureuse, notre rôle est d'apporter confort et mieux-être aux patientes. Une douzaine d'entre elles ont bénéficié d'une prise en charge par l'hypnoanalgésie. Les résultats sont spectaculaires' et positifs, pour elles et pour leurs familles », témoigne le Pr Pries. « Une évaluation médicale est actuellement réalisée sur les apports de cette pratique en fonction de différents critères : l'échelle de la douleur, l'anxiété, la consommation de médicaments comme les antalgiques morphiniques lourds en effets secondaires, ainsi que la durée d'hospitalisation, déjà réduite à six jours et qui pourrait être abaissée à cinq », poursuit-il. Ce projet innovant a été très bien accueilli par le service et par la direction, qui encourage le développement de cette pratique par la mise en place d'une formation certifiée mais non diplômante de sept jours ouverte principalement aux infirmiers. Une soixantaine de personnes ont ainsi été formées depuis deux ans. Une formation à l'hypnose conversationnelle a par ailleurs débuté depuis quelques mois dans le pôle neurosciences-locomoteur auprès des aide-soignants, infirmiers, kinésithérapeutes et manipulateurs radio demandeurs. L'équipe médicale se montre elle aussi convaincue : chirurgiens et anesthésistes sollicitant ponctuellement les services de l'hypnopraticienne, par exemple pour des pansements douloureux.
Etendre la pratique et développer la formation
L'encadrement du pôle neurosciences-locomoteur a initié et encouragé le développement de ce projet. « L'hypnose induit des valeurs de bienveillance et de bientraitance, elle implique une relation plus forte avec le patient et redonne tout son sens à la notion de prendre soin'. A ce titre, ce projet est un axe prioritaire du projet soignant du pôle », explique Marie-France Joyeux- Soyer, cadre supérieur de santé. « Nous souhaitons donc poursuivre la prise en charge en traumatologie et l'étendre à d'autres services en développant la formation institutionnelle des soignants et la formation du pôle. Cela permettra par ailleurs d'éviter l'écueil de la dépendance des soins à une seule personne », ajoute-t-elle.
Une consultation d'hypnose infirmière sera par ailleurs ouverte au public au sein de l'unité de médecines alternatives du centre régional d'étude et de traitement de la douleur à l'automne prochain.
Les différents types d'hypnose
Les trois types d'hypnose pratiqués lors de la prise en charge des patientes opérées de scoliose :
" L'hypnose conversationnelle:
Tout en conversant tranquillement avec le patient, l'hypnopraticien mène un travail complexe favorisant un climat dissociatif et apaisant, grâce à une trame de communication paraverbale hypnotique. La spontanéité et l'improvisation caractérisent cette forme d'hypnose.
" L'hypnose formelle :
L'hypnopraticien amène par sa simple voix à détacher le patient de son symptôme, douleur ou stress, pour modifier sa perception selon des phases bien définies : focalisation, induction, dissociation, transe, retour. "
L'autohypnose :
Le patient apprend à induire une transe personnelle suivant le même schéma qu'une séance d'hypnose formelle. Il peut modifier sa perception douloureuse ou émotionnelle à tout moment lorsqu'il en sent le besoin, par la mobilisation de ses ressources personnelles mises en lumière auprès de l'hypnopraticien.
Questions à... Marie-Pierre Delaunay, Infirmière hypnopraticienne
Comment en êtes-vous arrivée à pratiquer l'hypnose ?
Je suis infirmière en traumatologie au CHU depuis dix ans, et j'ai découvert le soin par l'hypnose au cours de la préparation de mon diplôme universitaire « douleur » en 2003. De 2008 à 2010, j'ai suivi une formation d'hypnose à l'Institut français d'hypnose à Paris, qui m'a délivré un diplôme d'hypnopraticienne en hypnoanalgésie et hypnosomatique. J'ai rapidement appliqué ces compétences au service des patients de traumatologie, par exemple au moment des pansements dans le cas de plaies douloureuses et complexes.
Comment cette pratique est-elle perçue autour de vous ?
Il est vrai que notre demande de formation à l'hypnose a tout d'abord étonné, mais l'institution nous a offert cette opportunité et nous sommes aujourd'hui deux hypnopraticiennes diplômées avec Béatrice Geaugeais, infirmière puéricultrice aux urgences pédiatriques. Depuis les débuts, je dirais que cette autre manière de soigner est perçue de façon simple. Les patients sont curieux au départ, et il faut parfois mener un travail de démystification, mais ils adhèrent vite et le discours devient inutile devant l'efficacité des résultats. De même pour les soignants et les médecins.
Qu'est-ce que l'hypnose apporte de plus que des soins « classiques » ?
La chimie est importante, mais parfois elle ne suffit pas et l'hypnose intervient comme une technique de soin complémentaire pour soulager la douleur. Et puis il s'agit d'établir une relation de confiance mutuelle avec le patient qui, guidé par l'hypnopraticien, va puiser dans ses ressources personnelles pour participer à son soulagement, voire à sa guérison. On dit que l'hypnose permet au soignant de « soulager les maux avec les mots », de modifier le soin et de « faire du bien sans faire du mal ». Je trouve que c'est une belle représentation de cette médecine alternative.